Ne dites pas à ma mère que je suis militant, elle croit que je suis terroriste
Notre démocratie oscille entre légitime défense et paranoïa sécuritaire. La qualification de « terroriste » se dilate et rogne de plus en plus la liberté d’association, d’expression ou de religion.
Près de huit ans après les attentats du 11 septembre 2001, ne serait-il pas temps de s’arracher à la stupeur qu’ils ont déclenchée, et qu’a contribué à entretenir le ressassement hypnotique de leurs images de pénétration et d’effondrement ? Ne serait-il pas temps de recommencer à penser à partir d’un concept – le terrorisme – dont l’énoncé même, la charge affective qu’il charrie, et l’hébétude qu’il provoque, ne favorisent guère le recul analytique ? En l’occurrence, penser à partir de ce concept, c’est aussi penser contre lui, en décodant les jeux rhétoriques auxquels il se prête et les effets de réel que produisent ceux-ci. En effet, si le terrorisme fait partie de ces concepts instables dans leur définition et flous dans leur périmètre, les conséquences de son maniement par les discours politique, judiciaire et médiatique sont en revanche particulièrement claires et concrètes. Elles tiennent dans un estompement progressif de la frontière entre contestation sociale et criminalité, un rétrécissement parallèle du champ des discours dicibles et entendables, et plus globalement une « politique de dépolitisation » qui transforme en ennemis à abattre, non seulement une poignée de groupuscules violents et sans assise sociale, mais aussi des mouvances plus larges et légitimes : des altermondialistes liégeois, hier, Greenpeace, aujourd’hui. Les syndicats demain ?
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