Quand les lobbies (dé)font les lois
Des groupes de pression puissants combinent à présent leurs forces pour faire obstacle au législateur sitôt que ce dernier ne résume pas l’intérêt général à la somme des (gros) intérêts particuliers. Il s’agit tantôt pour le lobby de l’agroalimentaire d’édulcorer les avertissements sanitaires destinés à lutter contre l’obésité, tantôt pour le groupe Suez d’offrir aux parlementaires des petits cadeaux qu’on espère lucratifs, tantôt pour les médias de récolter davantage de recettes publicitaires, grâce cette fois au Parlement européen.
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En décembre 2005, la loi sur les droits d’auteur dans l’économie numérique avait mis au jour des pratiques que l’on croyait réservées aux républiques bananières. Le président de l’Assemblée nationale, M. Jean-Louis Debré, avait dû chasser des émissaires de Virgin et de la Fnac qui, dans l’enceinte même de la représentation nationale, proposaient d’offrir des cartes prépayées de téléchargement musical aux députés…
Les journalistes Hélène Constanty et Vincent Nouzille ont recensé dans leur livre Députés sous influences (6) les multiples expressions de tels groupes, qui usent de moyens de pression de plus en plus élaborés pour imposer leurs vues : voyage payé par Suez lors de la Coupe du monde de football de 2006 (au moment où l’Assemblée nationale débattait de la privatisation d’EDF et de sa fusion avec Suez), inflation de clubs parlementaires et de colloques en tout genre financés par des intérêts privés. Sans oublier le recrutement d’assistants parlementaires (relativement) mal payés…
par Marie Bénilde sur Le Monde diplomatique : http://www.monde-diplomatique.fr/2007/03/BENILDE/14557