par Raoul Vaneigem
Ce texte, extrait du n°12 de la revue Internationale Situationniste (septembre 1969), aborde la notion de conseils ouvriers comme « premier principe de l’autogestion généralisée ».
L’imminence d’un bouleversement total, ressentie par tous, doit maintenant découvrir sa pratique : le passage à l’autogestion généralisée par l’instauration des conseils ouvriers.
Ne sacrifiez point le bien présent au bien à venir. Jouissez du moment, évitez toute association de mariage ou d’intérêt qui ne contenterait pas vos passions dès l’instant même. Pourquoi travailleriez-vous pour le bien à venir, puisqu’il surpassera vos vœux, et que vous n’aurez dans l’ordre combiné qu’un seul déplaisir, ce sera de ne pouvoir doubler la longueur des jours, afin de suture au cercle immense des jouissances que vous aurez à parcourir ?
Charles Fourier, Avis aux civilisés relativement à la prochaine métamorphose sociale.
… il est clair que le projet d’autogestion généralisée exige autant de précisions qu’il y a de désirs en chaque révolutionnaire, et autant de révolutionnaires qu’il y a de gens insatisfaits de leur vie quotidienne. La société spectaculaire-marchande fonde les conditions répressives et – contradictoirement, dans le refus qu’elle suscite – la positivité de la subjectivité ; de même la formation des conseils, pareillement issue de la lutte contre l’oppression globale, fonde les conditions d’une réalisation permanente de la subjectivité, sans autre limite que sa propre impatience à taire l’histoire. Ainsi l’autogestion généralisée se confond avec la capacité des conseils à réaliser historiquement l’imaginaire…
… Il est temps de commencer le sabotage positif de la société spectaculaire-marchande. Tant que l’on gardera pour tactique de masse la loi du plaisir immédiat, il n’y aura pas lieu de s’inquiéter du résultat…
… Il est facile, à seule fin d’exemple et d’émulation, d’évoquer ici quelques possibilités, dont la pratique des travailleurs libérés montrera vite l’insuffisance en toute occasion – ouvertement dans la grève, plus ou moins clandestinement dans le travail – inaugurer le règne de la gratuité en offrant aux amis et aux révolutionnaires des produits usinés ou stockés, en fabriquant des objets-cadeaux (émetteurs, jouets, armes, parures, machines à usages divers), en organisant, dans les grands magasins, des distributions « perlées » ou « sur le tas » de marchandises ; briser les lois de l’échange et amorcer la fin du salariat en s’appropriant collectivement des produits du travail, en se servant collectivement des machines à des fins personnelles et révolutionnaires ; déprécier la fonction de l’argent en généralisant les grèves de paiements (loyer, impôts, achats à tempéraments, transports, etc.) encourager la créativité de tous en mettant en marche, même par intermittence mais sous seul contrôle ouvrier, des secteurs d’approvisionnement et de production, et en regardant l’expérience comme un exercice nécessairement hésitant et perfectible ; liquider les hiérarchies et l’esprit de sacrifice, en traitant les chefs patronaux et syndicaux comme ils le méritent, en refusant le militantisme ; agir unitairement partout contre toutes les séparations ; extraire la théorie de toute pratique, et inversement par la rédaction de tracts, d’affiches, de chansons, etc…
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